Comment AirBnB révolutionne la sous-location à Genève
Avec l’essor des plateformes de location de maisons et d’appartements entre particuliers sur Internet, la sous-location connaît un véritable boom dans la ville de Genève. Mais quels sont les droits et obligations du locataire comme du propriétaire, et comment les adapter à la réalité des sites comme AirBnB?
«Splendide appartement traversant au centre-ville de Genève, idéal pour les vacanciers», «Petit studio (une chambre avec un lit) aux Pâquis, proche de la gare et idéal pour les voyages d’affaires», «maison au cœur de la campagne genevoise avec vue sur le lac Léman depuis la chambre parentale, prix: CHF 89.00 la nuit»… Les vacances d’été approchent et, avec elles, l’envie de sous-louer votre appartement sur AirBnB en votre absence comme le droit du bail l’y autorise. Plusieurs locataires songent à la location saisonnière. Beaucoup font déjà de la location de vacances depuis plusieurs années dans le plus grand secret sans respecter le droit du bail. Par peur de perdre leur appartement en recevant une résiliation du bail dans un marché du logement genevois extrêmement tendu? Pour en tirer une plus-value financière non-déclarée en faisant payer les utilisateurs son mois de loyer? Les raisons sont multiples. Toutefois, le locataire a des droits et des obligations à respecter avant de se lancer sur AirBnB.
AirBnB démocratise la sous-location
Avec l’essor des plateformes de location de logements entre particuliers sur Internet, la sous-location connaît un véritable boom à Genève en 2018 (maisons et appartements disponibles à Genève). Ce phénomène, amplifié par l’arrivée et le succès d’AirBnB en 2008, a pris tous les acteurs de l’immobilier et du tourisme de court en suscitant de vifs débats. En Suisse, comme à l’étranger, AirBnB démocratise certes la sous-location, mais sa pratique n’est pas sans risques pour le propriétaire (résidence principale, résidence secondaire ou copropriété), le bailleur, comme le locataire. Car en Suisse, la sous-location obéit à des règles strictes et le locataire ne peut en aucun cas sous-louer son bien sans autorisation écrite du bailleur.
- Mais comment adapter ces droits et obligations du locataire à la réalité des sites Internet qui proposent des appartements à louer (Droits et Obligations du locataire) ?
- Quels sont les risques de sous-louer sans accord écrit?
- Proposer mon appartement sur AirBnB est-il de la sous-location?
- Les locaux commerciaux sont-ils concernés?
- Comment rédiger un contrat de sous-location?
- Quelles sont les bonnes pratiques pour sous-louer mon appartement? Mon agence immobilière peut-elle m’aider (liste des agences immobilières à Genève)?
Que dit la loi? Les questions des locataires sont multiples et les réponses ne sont pas toujours aussi compliquées qu’ils ne l’imaginent. Prenons les choses depuis le début.
3000 logements à Genève
Fondée en 2008, AirBnB est une plateforme californienne proposant aux particuliers (propriétaires comme locataires) de louer tout ou une partie de son habitation comme logement d’appoint pour des courtes durées. Le site propose désormais des millions d’objets de toutes les tailles et de tous les standing dans 191 pays dans le monde. En ville de Genève, environ 3000 logements entiers et quelques 4800 lits sont concernés, selon les chiffres communiqués par AirBnB en 2018. Le site se finance en prélevant des commissions sur les transactions, à hauteur de 3% pour l’hôte et de 6 à 12% pour les voyageurs tels qu’un voyageur d’affaire ou pour des vacanciers.
Pour un nombre croissant de locataires, AirBnB est donc devenu un réflexe. Mais s’agit-il pour autant d’une sous-location standard? Affirmatif, dit la loi. Le locataire qui souhaite sous-louer tout ou partie de son logement, par l’intermédiaire d’un site de partage, doit préalablement requérir et obtenir le consentement du bailleur. En effet, le rapport entre les loueurs et les voyageurs est considéré comme de la sous-location même s’il s’agit d’un séjour de courte durée. Les bailleurs peuvent donc refuser son consentement si le locataire ne l’informe pas des conditions de la sous-location tels que l’identité du sous-locataire, la durée de la sous-location, les revenus locatifs, etc. .
Attention aux sous-locations abusives
Autre motif de refus: si la sous-location est considérée comme abusive, à savoir si le locataire entend faire un bénéfice en sous-louant. Un prix avec une légère majoration allant jusqu’à 20% du loyer principal est toutefois admis, si le locataire couvre par-là même des prestations supplémentaires (logement avec une chambre remis meublé par exemple). Le bailleur peut enfin s’opposer à la sous-location si elle présente pour lui un inconvénient majeur (changement fréquent d’hôtes, usage accru lorsque les visiteurs défilent) et le non-respect des devoirs du locataire (dégradations du bien immobilier, bruits, fumée malgré l’interdiction). Le locataire s’expose à un refus justifié de celui-ci voire à une résiliation anticipée de son bail (Comment résilier mon contrat de location avant la fin du bail?).
En Suisse romande, ce consentement à la sous-location doit être donné par écrit (lire la marche à suivre pour sous-louer son appartement ). C’est-à-dire que le locataire doit informer son agence immobilière ou son propriétaire de son désir de sous-louer son appartement. Il doit en outre expliciter les conditions de cette sous-location qui donnera lieu à un contrat presque similaire au contrat de location. Beaucoup de locataires s’y refusent et s’entendent oralement avec le sous-locataire. Ils ignorent pourtant que les agences immobilières sont aussi là pour les épauler dans ces processus administratifs et limiter les risques tels que des éventuels impayés. En ville de Genève, l’agence immobilière Moser Vernet & Cie propose, par exemple aux locataires une marche à suivre pouvant les aider à rédiger le contrat de sous-location dans le respect des normes légales. Ce document vise avant tout à protéger le locataire et le propriétaire.
Un contrat pour se prémunir des risques
C’est un point crucial plus particulièrement dans le contexte d’une sous-location de courte durée sur AirBnB. Soulignons que la plateforme californienne ne prend aucun risque. Elle ne vend qu’une «mise en relation» entre hôtes et voyageurs. Le site fonctionne donc comme une «place de marché». Ses conditions générales laissent la responsabilité du respect des lois aux utilisateurs. Ainsi, c’est bien l’hébergeur qui prend tous les risques afférents à la location ou à la sous-location et, de l’autre côté, le client lui aussi peut tomber sur une fausse annonce ou voir sa réservation annulée à la dernière minute.
S’enrichir, grâce à AirBnB?
L’autre enjeu est financier. N’oublions pas que les loyers et les charges perçus dans le cadre d’une sous-location ou d’une location d’un logement sont imposés et doivent obligatoirement être déclarés. A défaut, cela s’apparente à de la fraude fiscale. Pourtant, une grande partie des efforts marketing et communicationnels d’AirBnB sont axés sur la recherche d’une plus-value financière. Et cela pour inciter le maximum de personne à proposer des annonces de sous-location de leur logement sur leur site Internet. L’argument financier a donc poussé certains locataires à monter un vrai business professionnel de la sous-location, au même titre qu’un opérateur hôtelier traditionnel. Mais sans les contraintes: taxe de séjour, assujettissement à la TVA, respect des normes d’hygiène et de sécurité. Face à cette concurrence qu’ils estiment déloyale, beaucoup d’hôteliers vendent désormais leur prestation sur AirBnB.
Assèchement de l’offre locative
Les professionnels de l’hébergement touristique ne sont pas les seuls à grincer des dents. Les acteurs de l’immobilier sont eux aussi partis en croisade contre AirBnB. Ils estiment entre autres que la plateforme californienne contribue à assécher l’offre de logements. En effet due à cet abattement, des centaines d’appartements échappent au marché de la location, ce qui n’est pas sain dans un marché déjà frappé par la pénurie, comme c’est le cas à Genève. Depuis 2008, AirBnB a donc suscité une véritable révolution en inventant une nouvelle forme de sous-location. Surtout, la plateforme a forcé le droit du bail suisse à s’adapter à cette nouvelle donne.
Dans son rapport publié le 15 novembre 2017, le Conseil fédéral a passé en revue les diverses lois fédérales qui s’appliquent aux locations de logements effectuées par le biais de plateformes en ligne (par ex. AirBnB, Wimdu, Vrbo). Il est arrivé à la conclusion que celles-ci sont relativement bien adaptées aux récentes formes d’hébergement, sous réserve de trois ajustements nécessaires en droit du bail. Selon le projet du gouvernement, le locataire proposant son logement sur ces sites n’aura plus besoin du consentement exprès de son bailleur pour chaque location.
Les efforts d’adaptation du droit du bail
A l’avenir, le locataire devrait pouvoir obtenir du bailleur un consentement général à la sous-location répétée de courte durée de son logement sur une plateforme de réservation en ligne. Cette adaptation permettra au locataire de ne pas solliciter son bailleur pour chaque fois que sa maison ou son appartement est à sous-louer (appartement meublé, maison meublée etc.). Quant au propriétaire du logement locatif, il ne devrait plus avoir à examiner plusieurs demandes en très peu de temps. Ses charges administratives se réduiront en conséquence (rédaction de divers contrats, état des lieux etc.). Les conditions de la sous-location devront figurer dans la demande du locataire. Celui-ci indiquera à son propriétaire le montant du paiement du loyer, les pièces et les locaux concernés ainsi que leur occupation, en donnant à chaque fois les valeurs maximales.
Selon l’ASLOCA, l’association suisse des locataires, ces adaptations protègent du congé les locataires proposant leur appartement à la location touristique. Mais pour la Fédération romande immobilière (FRI), le projet du Conseil fédéral dénature le but de la sous-location et porte atteinte aux droits et obligations du propriétaire qui n’a plus le libre-choix d’autoriser ou non cette sous-location.
La ville de Genève limite le nombre de jours de location
Depuis le 1er avril 2018, il est ainsi interdit de louer son logement plus de 60 jours par an sur AirBnB dans le canton de Genève. Selon les chiffres estimés par AirBnB à partir des commentaires laissés sur le site, plus d’un tiers des biens immobiliers genevois proposés sur la plateforme ont été loués plus de 60 jours en 2017. Avec cette limitation, le gouvernement genevois veut empêcher une professionnalisation de la sous-location pour ne pas concurrencer abusivement les professionnels de l’hôtellerie. AirBnB a refusé de mettre en pratique cette limitation sur son site. Le canton s’organisera donc seul avec des contrôleurs.
Le phénomène AirBnB a complètement redistribué les cartes. Son succès pose de très nombreuses questions telles que le contrat de bail, l’assurance habitation, la professionnalisation de la sous-location etc. La Confédération et le canton de Genève ont tenté d’y répondre en adaptant leurs législations. Sans être alarmiste ni réfractaire aux nouvelles formes de communication et d’échange entre particuliers, il est important de poser un cadre légal clair à cette activité dans le respect des droits et obligations du locataire comme du bailleur . Ce n’est que sur cette base que des discussions devront être menées avec les sites d’hébergement afin de simplifier les démarches des usagers et des autorités.
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